• Last Falls (essai, version annotée) par D. H. T. - Chapitre 6: Notes de lectures

    © Terence DEN HOED, 2015.

     

    Chapitre 6: Notes de lectures (2011-2013)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Sur "Réussir sa mort: anti-méthode pour vivre", essai, de Fabrice Hadjaj: ce livre est mon ennemi (commentaire du 02/02/2011). L'acceptation de la mort est tout aussi légitime que l'acceptation de la vie. Hélas ce livre nous incite à accepter non pas la mort mais l'échec, et à renoncer au contrôle que nous exerçons sur notre propre vie. Pourtant ce contrôle est ce qui nous protège du monde. Sournoisement, ce livre entend nous pousser à la soumission, au rabaissement face à la société. L'individualisme est un combat: un combat contre la société pour mener sa vie comme on l'a choisi, et pour mourir quand on le décide. Au nom de ce combat, individu contre la société, individu et fier de l'être. Note: 2/10.

     

     

     

    Sur "Discrimination positive: pourquoi la France ne peut y échapper", essai, de Yacine Saberg: l'enfer pavé de bonnes intentions (commentaire du 18/08/2013). La notion de discrimination positive se base sur une absurdité logique, énonçant la possibilité pour une attitude de toute façon condamnable de prendre une tournure bénéfique, comme si le mal pouvait devenir bon, comme si une politique vertueuse adoptait le vice comme principe de fonctionnement. Ouvrir le marché de l'emploi aux minorités dites visibles part d'un bon sentiment, celui de n'exclure personne, mais finit par en exclure certains pour en inclure d'autres. Cette méthode, en voie d'abandon aux États-Unis, n'a d'ailleurs pas fait ses preuves. Les minorités stigmatisées, déçues, se retrouvent à présent face à leur amertume. Note: 2/10.

     

     

     

    Sur "Le tarot: outil de management", essai, de Michel Giffard: un tissu d'élucubrations sans aucun fondement valable (commentaire du 18/08/2013). Ni professionnel, ni scientifique. Telles sont les deux principales raisons qui condamnent ce type d'ouvrage à ne jamais acquérir la moindre crédibilité. D'un point de vue interne, pour qu'un outil de management soit recevable, il faudrait recourir à des éléments spécifiquement en rapport avec le travail, les compétences du candidat. Même la nécessité de départager deux postulants aux parcours similaires ne saurait justifier le recours à des grilles de lecture déconnectées de la situation d'embauche. Même le tirage au sort serait plus sérieux et plus équitable, car reconnaissant son propre caractère aléatoire. D'un point de vue externe, la rationalité demande aux techniques de recrutement de s'aider d'un véritable apport scientifique et objectif. Le tarot n'en est pas un, pas plus que l'ésotérisme en général. Il faut interdire ces pratiques, au moins dans le cadre de l'entreprise, et ne les tolérer, à la rigueur, qu'à titre de divertissement privé, là où se trouve leur vraie place, même s'il s'agit d'un divertissement de piètre qualité. Note: 2/10.

     

     

     

    Sur "La mafia française: ses méthodes, ses réseaux", essai, de Bruno Mercier: ce livre prend la défense de la franc-maçonnerie, dommage (commentaire du 12/06/2011). Il est louable de dénoncer la mafia en France, d'affirmer et de montrer que le phénomène mafieux existe dans ce pays, non seulement parce que les mafias étrangères s'y exportent, mais surtout parce que l'Hexagone dispose de ses propres réseaux criminels organisés et infiltrés dans les services de l'État. Les institutions françaises sont maculées du sang de leurs passé colonial, qui est un passé criminel, ainsi que de leurs crimes présents, crimes contre l'Afrique notamment que la France continue d'exploiter. Malheureusement, l'auteur écarte la possibilité d'inclure la franc-maçonnerie dans sa définition de la mafia hexagonale. Il va même plus loin en dressant un portrait élogieux de cette organisation, selon lui minoritairement infiltrée par la mafia, osant même la présenter comme un rempart contre la criminalité organisée, comme un espoir de lutter contre celle-ci. C'est là que le bât blesse car la franc-maçonnerie, extérieurement, présente des caractéristiques similaires à celles de toute mafia si l'on les considère conjointement: hiérarchie interne, organisation de type confraternel, cooptation, rites et codes ésotériques, obscurantisme, élitisme, complaisance à l'égard des notables, des puissances politiques et financières en place, discrétion et tentative de s'ériger, implicitement, en autorité susceptible d'exercer un pouvoir sur l'État et sur la population. L'État dans l'État, le gouvernement parallèle et officieux en marge du pouvoir principal et officiel, s'efforçant de prendre la place de ce dernier, reproduisant ses réseaux de génération en génération de manière à pérenniser son influence tout en augmentant sa puissance et sa fortune au détriment de toute équité, telle pourrait être la définition de toute mafia. L'auteur a certainement raison de dénoncer ceux qu'ils dénoncent, mais force est de reconnaître que cette définition va comme un gant à la franc-maçonnerie, qui mériterait d'être épinglée elle aussi dans ce tableau de chasse. Dès lors, ce que ce livre, quand même à lire, laisse entrevoir, c'est l'existence non pas d'une, mais de plusieurs mafias en France, en relation de rivalité les unes avec les autres, et qui se rejettent mutuellement la faute les unes sur les autres. Tout se passe comme si la mafia française était une mafia qui ne s'assume pas, une mafia qui en est bien une mais qui refuse de le reconnaître et qui passe son temps à dire: "La mafia, c'est les autres". Mais la franc-maçonnerie est également une mafia. Ce livre n'a donc raison que partiellement. Si l'on veut lutter contre la corruption confraternelle, ce que nous pouvons faire, à notre échelle de simples citoyens, c'est répéter inlassablement autour de nous, surtout aux jeunes: ne faites jamais partie d'aucune fraternité, et vous resterez des individus libres et intègres. Note: 4/10. Voir aussi, de préférence: "Un État dans l'État: le contre-pouvoir maçonnique", essai, de Sophie Coignard, et: "La République du copinage: enquête sur la France des réseaux de pouvoir", essai, de Vincent Nouzille.

     

     

     

    Sur "Comprendre l'Empire", essai, d'Alain Soral: un succès disproportionné, trahissant un manque de recul critique (commentaire du 02/08/2013). "Comprendre l'Empire" n'a pas tort sur toute la ligne, mais l'auteur n'est ni le premier ni le seul de ses contemporains à souscrire à une telle ligne idéologique. Même les vétérans, sous De Gaulle, connaissaient déjà l'impérialisme américain[1], ses accointances avec la droite israélienne et l'affaiblissement des États-Nations découlant de l'ingérence outre-Atlantique dans le monde. Il s'agit là d'un livre enrichissant mais mineur, d'une portée à relativiser. Attention aussi à tout ce qu'il ne dit pas, sinon à demi-mot. Il faut sortir des bouquins pour décortiquer, en sus, les fameuses vidéos du mois. Des idées intéressantes et d'autres plus discutables, on n'est pas obligé d'être avec lui ni contre lui, ni de partager son humanisme, mais un certain nombre d'aspects qui mériteraient d'être abordés ne sont pas mis en avant dans ce discours pro-national ni dans celui de ses détracteurs, et pour cause: entre autres l'écologie, le problème de la surpopulation et de la surproductivité, la possibilité d'envisager une gestion locale et/ou un fédéralisme régional. Pour user d'une métaphore, l'apprenti-politologue est à l'image de l'amateur de musique que l'on connaît. On assiste à une démystification du phénomène Soral, permettant d'apprécier sa part de pertinence et son effort argumentatif soutenu bien qu'inégal, mais aussi son schématisme réducteur et son manque d'imagination et de créativité, en musicographie comme en analyse géopolitique. Chez les fascistes français, Lucien Rebatet, lui, était un grand mélomane, incomparable pour sa connaissance de la musique classique. Soral n'a rien apporté à la critique jazz et rock; en musiques ethniques, il est nul. Ce dernier point n'a rien d'anodin et devrait en alerter plus d'un. L'essayiste parle du monde avec le même ethnocentrisme qui le caractérise quand il se penche sur les arts. Il n'a d'yeux que pour ce qu'il appelle les intérêts supérieurs de la France, ne reniant pas le passé colonial de l'Hexagone, passant sous silence le colonialisme gaullien, allant jusqu'à prendre rétrospectivement position en faveur de Sirven dans l'affaire Elf, plutôt que de donner raison aux juges anti-corruption sur ce point. Pire, son chauvinisme antisémite va à l'encontre de l'idée de réconciliation dont il se réclame pourtant. Quand il cite Proudhon comme un de ses maîtres à penser, il se garde bien de préciser quelles étaient les connivences maçonniques de cet anarchiste embourgeoisé, apôtre du double discours autant que judéophobe fielleux, nonobstant l'importance de sa contribution à l'histoire du socialisme. La réconciliation qui semble motiver le pseudo-sociologue de Youtube, c'est d'abord celle, post-mortem, entre Maurras et la Résistance. Ensuite vient la main tendue des catholiques marxistes aux ouvriers musulmans. Qu'en est-il de la réconciliation possible entre catholiques et protestants, entre Juifs et Arabes? Soral n'en a cure, il se nourrit de la naïveté, du désarroi ou de la haine de son lectorat/auditoire acquis à sa cause par dépit, car tel un borgne au royaume des aveugles. Seulement, quand certains de ses militants, habitués tout comme leur patriarche au recours à l'insulte nominative, aux attaques ad hominem et à la violence physique, bien loin de l'envergure et de la dignité d'un Sartre ou d'un Bourdieu, quand ces militants, donc, se laissent aller, sur un forum de jeux vidéo, à se réjouir publiquement du décès de Clément Méric, et quand le site d'É&R en vient à faire la publicité d'Aube Dorée, dont les milices tabassent à mort les immigrés africains et asiatiques dans les rues d'Athènes, on se dit que la coupe est pleine. Même si la France actuelle est tenue par des pourris et que la politique s'annonce sans issue heureuse, une révolution soralienne serait un remède encore pire que le mal. Il faut espérer qu'elle n'aura jamais lieu. Note: 4/10.

     

     

     

    Sur "La France orange mécanique", essai, de Laurent Obertone: bon diagnostic, mauvaise analyse des causes (commentaire du 08/08/2013). Il ne s'agit pas de nier la criminalité ni la délinquance, encore moins l'horreur décrite. Les faits relatés sont sourcés, ont eu droit à des articles dans divers journaux et magazines, y compris chez ceux pourtant dénoncés comme des autruches au service de la morale dominante. Preuve que ce document n'invente rien, preuve aussi qu'il ne fait que défoncer des portes ouvertes, ou qu'il arrive après la bataille. Mais son travail s'avère utile, utile pour se souvenir et pour réunir un maximum d'informations corroborant la présentation d'une situation dramatique. Plus que les sources journalistiques, bon nombre de concitoyens peuvent en témoigner, à leur grand malheur. Le problème n'est pas là, et ne tient pas non plus aux saines évidences assénées en guise de rappel, à savoir que le crime doit être puni, et que rien ne peut justifier le laxisme des autorités et des experts, qui ont toujours tort quand ils veulent comprendre les bourreaux tout en méprisant les victimes[2]. Le problème de la réflexion menée se situe non au niveau du diagnostic et du plaidoyer en faveur du droit, mais au niveau de l'analyse des causes. D'un point de vue logique, on ne peut à la fois justifier la colonisation au nom de l'esprit de compétition, et blâmer le retour de la violence historique[3]. Il faut condamner toute agressivité, tant celle de l'envahisseur esclavagiste que celle du petit voyou qui n'hésite pas à violer et à torturer. Or, on lit entre les lignes, et parfois même dans les lignes, que l'avocat des Blancs donnerait raison à ses ancêtres qui ont fait main basse sur l'Afrique, tout en expliquant le malheur de la France actuelle par la soi-disant faute à l'étranger. Les gouvernements n'ont jamais consenti à mettre en place une politique de gestion de l'immigration, comme celle, qui s'imposerait au bon sens, consistant à n'accueillir de nouveaux arrivants dans un pays donné que dans la mesure où le pays en question garantirait emplois et logements, pour une logique de travail et contre une logique d'assistanat. La faute première en revient aux dirigeants, même si les auteurs d'actes malveillants doivent répondre de leurs actes. Sur ce point, l'ouvrage dénonce à bon droit les politiques de gauche comme de droite. Bien sûr ses adversaires idéologiques ont tort d'encourager le laisser-faire au nom de l'humanisme[4], pourtant ce n'est pas tant cette motivation qui prime dans leur désertion que l'abandon de l'État de droit, les politiciens et leurs cautions universitaires apparaissant comme des carriéristes notoires, vivant sur le dos du peuple tout en investissant le moins possible dans les structures aptes à garantir la sécurité pour tout un chacun et non seulement pour quelques nantis. Là aussi, on reconnaîtra la pertinence de réclamer davantage de moyens et d'effectifs pour la police, la gendarmerie, les pompiers, les tribunaux et les prisons, comme celle de rouvrir le débat sur la peine capitale et sur la légalisation du port d'arme civil. Toutefois, cela ne suffirait pas. Puisque, en plus des faits, les origines ethniques des incriminés se retrouvent ici placées sous les projecteurs, il faudrait rendre aux autres pays, anciennes colonies pour certains d'entre eux, la possibilité d'assurer à leurs autochtones une vie décente sur place, qui endiguerait naturellement les mouvements de population intempestifs et désespérés. L'effort de codéveloppement hors frontières manque tout autant que la juste répression intra muros. C'est ce que "La France orange mécanique" ne dit pas, car son contenu approuve la compétition entre pays[5], au lieu d'encourager la coopération en amont[6], laquelle permettrait de lutter, à la source, contre les phénomènes tragiques se multipliant près de chez soi et loin de chez soi, tous corrélés. Note: 4/10.

     

     

     

    Sur "DRH: le livre noir", essai, de Jean-François Amadieu: honnête et sérieux, au service d'un métier pas si ingrat (commentaire du 18/08/2013). Autant le dire tout de suite, il y a pire que la situation d'un directeur des ressources humaines au sein d'une entreprise. En termes de rémunération, ce n'est pas une mauvaise place. Sur le terrain, ce métier a même acquis la fâcheuse réputation de servir bassement les intérêts du patronat, dans le mépris des salariés[7]. Voilà pour le rappel en faveur de la grogne des emplois pénibles, dangereux et sous-payés, dans un contexte où les grands décideurs, à la tête de sociétés florissantes, licencient non par nécessité mais pour augmenter encore davantage leurs profits. L'auteur ne manque d'ailleurs pas de dénoncer cette injustice, développant un plaidoyer pertinent pour le mouvement des RH en montrant l'autre facette de la profession, celle d'une posture soumise, impuissante, reléguée à l'arrière-garde du marketing et de la finance, malgré la bonne volonté que certains aimeraient déployer, à leur niveau, pour réparer les torts. En tout cas, plus que leurs clients, les entrepreneurs demeurent les rois, surtout ceux du CAC 40, puisque l'exemple hexagonal sert de référence principale à l'étude, dans un habile chassé-croisé avec les États-Unis où, comme en Europe, tout change pour que rien ne change. Avant de l'avoir vécu soi-même à ses dépens, le novice perçoit le piston, la discrimination, les disparités salariales et le harcèlement comme des légendes urbaines. À l'appui des galères vécues par le lecteur au quotidien, le livre confirme toute la réalité du mal, au-delà de l'imagination la plus pessimiste, un mal dont on sent que les chiffres n'arrivent pas à en décrire l'ampleur intégralement, omerta, gêne et isolement obligent. Sans effet d'insistance, de constat pénible en désespoir justifié, toutes les étapes du rapport de force entre la base et la direction ramènent à l'absence d'engagement des pouvoirs publics dans l'encadrement des pontes du secteur privé, vu que le petit entrepreneur, lui, connaît plutôt la souffrance. Là où l'État devrait sévir, il se fait le complice des têtes d'affiches et de leurs actionnaires voraces. Élus de la république et hauts fonctionnaires voient donc, de gouvernement libéral en gouvernement social, bonnet blanc et blanc bonnet, l'intérêt qu'ils ont à laisser faire les voyous friqués, lesquels se déchargent sournoisement sur l'assistanat quand il s'agit de mettre les pauvres gens à la porte. Il est tellement plus facile pour eux d'envoyer leurs ouvriers au chômage, arguant que c'est au petit contribuable d'aider son prochain, plutôt que de respecter le labeur en s'engageant à récompenser qui de droit par des salaires décents. On réalise toute la complicité qui unit gourous de l'industrie et planqués du Pôle Emploi, capitalisme et socialisme marchant la main dans la main[8]. Sinon, un programme volontaire visant à faire travailler tout le monde aurait vu le jour depuis longtemps. De là, corrélativement, s'explique aussi la porte ouverte aux dérives les plus délirantes, que la loi devrait fermement condamner et que la justice devrait punir avec autant de fermeté: réseautage franc-maçon, recrutement ésotérique, coaching sectaire, scientologue ou autre. Le chapitre sur la diversité, lui, se découvre sous un jour plus délicat. Certes, il pose les bonnes questions. Le concept est flou, la discrimination positive échouera probablement en France comme elle a échoué aux États-Unis. Brouiller toute approche juridique de la discrimination arrange les coupables sous prétexte de tendre la main aux victimes. On comprend aussi que, si les écarts de salaires entre hommes et femmes tendent à se réduire parfois, c'est à cause de la précarité qui gagne aussi les hommes, et parce que quelques dirigeantes privilégiées contribuent à la moyenne d'une population féminine globalement sous-payée. Mensonge et poudre aux yeux, donc. Pour autant, le parti pris républicain de l'universitaire avisé ne permet pas d'épuiser toutes les perspectives. Face aux quotas, il propose le CV anonyme, solution la plus cohérente, il est vrai, dans une civilisation française qui refuse de reconnaître le multiculturalisme et d'accorder un statut aux identités ethniques. Il y aurait pourtant moyen d'aller plus loin, de confier le recrutement aux services de l'État, lequel imposerait, sur la base de compétences objectives requises pour un poste donné, les candidats concernés par ordre d'arrivée, sans aucune préférence. Ce serait parier sur une conflictualité salutaire autant qu'inexistante. Et ce serait aussi, en un sens, la fin des ressources humaines. Note: 6/10.

     

     

     

     



     

    Notes de fin du chapitre 6 (2014-2015)

     

     

     

    [1] "En fait, le jaillissement des Etats-Unis au premier rang du monde où il leur faut vivre sous peine de rétrograder dangereusement, est la conséquence du prodigieux développement de leur puissance qui, pour se définir, mobilise tous les adjectifs: économique, politique, scientifique, militaire, mondiale." (Braudel, p. 654)

     

     

     
     
     

    [2] "Au fur et à mesure qu’une communauté s’accroît, elle accorde moins d’importance aux fautes de l’individu, parce que celles-ci ne peuvent plus lui apparaître subversives et dangereuses pour le maintien de l’ensemble dans la même mesure qu’auparavant: le malfaiteur n’est plus "privé de paix" et proscrit, la colère générale ne peut plus dorénavant se déchaîner contre lui avec autant d’acharnement, au contraire le malfaiteur est maintenant scrupuleusement défendu par l’ensemble social et sous sa protection contre cette colère, en particulier contre celle de sa victime immédiate." (Nietzsche, p. 83)

     

     

     
     
     

    [3] "Les chocs violents de civilisations: le raisonnement, jusqu’ici, suppose des civilisations en rapport pacifique les unes avec les autres, libres de leurs choix. Or les rapports violents ont été souvent la règle. Toujours tragiques, ils ont été assez souvent inutiles à long terme." (Braudel, p. 79)

     

     

     
     
     

    [4] "L’injonction du laisser-faire est donc absurde car l’homme se caractérise précisément par le fait qu’il ne laisse pas la nature aller d’elle-même." (Spitz, p. 251)

     

     

     
     
     

    [5] "Si nous nous en tenons au principe de la souveraineté illimitée des Etats, cela revient à admettre que chaque Etat se réserve le droit de défendre ses objectifs par les moyens d’une guerre. Chaque nation doit alors être prête pour cette éventualité, c’est-à-dire qu’elle doit tendre de toutes ses forces à être plus forte que chacune des autres." (Einstein, p. 135)

     

     

     
     
     

    [6] "Il existe trois types de relations: les relations de dépendance, d’indépendance et d’interdépendance. L’interdépendance est le fait que les parties dépendent les unes des autres dans l’atteinte de leurs objectifs respectifs. Les négociations (tout comme les conflits) sont par excellence des situations d’interdépendance. Il existe deux types d’interdépendance (négative et positive) qui correspondent à deux types de négociations définies dans la littérature (négociation distributive ou sur position; négociation intégrative ou raisonnée)." (Demoulin, p. 55)

     

    "Les chercheurs distinguent les négociations dites distributives des négociations intégratives. Les négociations distributives font référence à des situations où les objectifs des parties sont mutuellement exclusifs en ce sens que l’atteinte de ses objectifs par une des parties est directement proportionnelle à la perte subie par la partie adverse. Les négociations distributives sont marquées par un niveau de compétition élevé et la poursuite des intérêts personnels au détriment des intérêts collectifs. Par contraste, les négociations intégratives se produisent lorsque les intérêts des parties ne sont pas mutuellement exclusifs, qu’il existe une possibilité de "gagner ensemble". Ces négociations mettent en avant la coopération et la poursuite des intérêts collectifs plutôt que personnels." (ibidem, p. 46)

     

    "Dans de nombreux cas, le comportement qui est le plus rationnel est le comportement compétitif. Néanmoins, la compétition mutuelle engendre des bénéfices moindres que la coopération mutuelle. Cherchez la collaboration avec votre partenaire, mais ne collaborez pas à n’importe quel prix. N’oubliez pas que si votre partenaire est du genre compétitif, il n’hésitera pas à exploiter vos tentatives de conciliation à son avantage. Distinguez la situation donnée de la situation effective. Le donné correspond au gain immédiat. C’est rarement le seul enjeu. Envisagez tous les aspects du problème (le gain immédiat, l’importance de la relation à l’autre, etc.) pour définir quelle est votre utilité effective dans la situation. Dans une situation de coopération mutuelle établie, méfiez-vous de tout changement qui survient dans l’environnement. Toute transformation du contexte est susceptible de bouleverser l’équilibre." (ibidem, p. 75)

     

    "La focalisation sur les intérêts n’est certes pas une panacée ni l’assurance d’obtenir un résultat profitable pour tous, elle est néanmoins une des stratégies les plus prometteuses et les plus efficaces. Elle requiert l’implication de chacun dans le processus, la confiance entre les parties, une bonne dose de créativité et un engagement de tous à privilégier une solution optimale mutuellement bénéfique au détriment d’une solution ne privilégiant que les intérêts personnels." (ibidem, p. 98)

     

     

     
     
     

    [7] "La question de la cohérence se trouve à nouveau posée et derrière elle celle de l’acceptation de la réalité telle qu’elle est. La transformation de cette réalité, appelons cela le changement de culture si l’on veut, implique de faire des choix. Ils font sortir le dirigeant de ses rêves idéalisés, abstraits et parfois manipulatoires. Ils le ramènent à la nécessité de dire clairement les comportements qu’il souhaite et surtout à créer les conditions qui les rendent effectifs." (Dupuy, pp. 199-200)

     

    "En somme, les salariés fuient l’idéologie dont on croyait qu’elle était jusqu’ici l’apanage du monde politique. Et pour poursuivre la comparaison, observons qu’il est troublant de retrouver derrière l’expression après tout bonhomme de "connaissance ordinaire" une idéologie quasi totalitaire, qui, comme toutes les idéologies, a ses théoriciens et ses propagandistes. Je sais que l’emploi d’une telle expression fera réagir autant que celui du mot "coercition", aujourd’hui accepté, même du bout des lèvres, pour désigner les méthodes managériales destinées à contrôler l’activité des salariés. Mais au-delà de la sévérité du vocabulaire, chacun comprendra que ces méthodes, ces façons de faire, ces discours abstraits, théoriques et manipulatoires ont atteint leur limite." (ibidem, pp. 226-227)

     

    "Ce qui importe, c’est la force de la pression exercée sur les dirigeants pour qu’ils s’intéressent enfin au concret de leur entreprise et de ses membres. Ils ont pour le moment négligé cette réalité mais, comme le cheval au galop sur les grèves du Mont-Saint-Michel, elle finira bien par les rattraper." (ibidem, pp. 232-233)

     

     

     
     
     

    [8] "Il ne fait aucun doute que l’on a assisté à un accroissement rapide de la flexibilité et, corrélativement, de la précarisation de la main-d’œuvre après l’arrivée au pouvoir des socialistes (qui avaient été élus sur un programme accordant une place importante à la protection de la législation du travail)." (Boltanski, p. 304)